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Pascal Mélaine

Le poids de l’enfance : se détacher de ses traumatismes.


Nous trainons derrière nous tout au long de notre vie tout ce que nous avons vécu durant notre enfance. Les valeurs qu’on nous a inculquées, la confiance qu’on nous a transmise, l’amour qu’on nous a donné bien entendu, mais aussi tous les traumatismes que nous avons pu subir. Humiliations, maltraitances, harcèlement, abandon, rejet, trahison… sont autant de chaînes qui nous empêchent de nous épanouir à l’âge adulte.



L’enfant que nous avons été continue d’exister en nous.


Quel que soit notre âge, l’enfant que nous avons été continue d’exister en nous. Il se tapit quelque part en nous et nous envoie des signaux, de joie ou de détresse selon les cas. Cet enfant ne disparaît jamais. Nous sommes le produit des différents événements qui nous ont soit construits de façon solide, soit malheureusement, abîmés.


Si un enfant a été élevé dans un milieu sécure, stable, s’il a reçu suffisamment d’attentions et d’amour, si son entourage a su lui donner confiance en lui, l’adulte en devenir sera davantage équilibré et serein. Ce qui ne signifie pas qu’il va vivre sa vie sans aucune turbulence, mais les bases étant stables, il saura se relever rapidement lorsqu’il rencontrera des difficultés.


À contrario, un enfant qui a vécu dans une famille dysfonctionnelle, qui a manqué d’amour, qui a subi des violences, portera ces stigmates en lui, même à l’âge adulte.


Comme l’a écrit le psychiatre américain Bessel van der Kolk « Le corps n’oublie rien ». Ni les violences dont il a été victime, ni les paroles blessantes qui lui ont été adressées. Nous gardons en nous l’empreinte des événements traumatiques que nous avons vécus durant notre enfance.


Nous fonctionnons exactement comme des poupées russes. Si la poupée centrale est abîmée, fêlée, l’adulte que nous devenons ne tiendra pas debout correctement, il sera pour ainsi dire bancal.


Bien souvent, nous entendons dans les cabinets de consultation le genre de phrases suivantes : « Ça, je n’y pense plus, c’est fini, ça remonte à longtemps, c’est derrière moi maintenant. » Les patients jettent un énorme plaid sur les souvenirs douloureux, sur les plaies béantes de l’enfance, afin de survivre et d’avancer tant bien que mal. C’est ce qu’on appelle un mécanisme de défense. L’inconscient met en place des stratagèmes afin de surmonter ce qui lui apparaît comme insupportable.


Mais aucune plaie n’est en réalité cicatrisée tant qu’on ne l’a pas soignée comme il se doit. L’ignorer n’y change rien, au mieux elle fait souffrir, au pire elle s’infecte et la douleur empire.


Le psychologue Pierre Janet a expliqué qu’après avoir subi un traumatisme, les individus le revivent continuellement à travers les émotions qu’ils ont ressenties alors et qui ne cessent de se répéter, à l’infini. Du coup la personne concernée est comme ligotée à son passé et ne peut avancer.


Il est fréquent de recevoir en consultation des patients qui ont été rabaissés, humiliés par un parent voire les deux.


« Je ne sais pas ce que je vais faire de toi… Personne ne voudra jamais de toi… Regarde-toi, tu es tellement moche… Je me demande même si tu es de moi… Comment peut-on être aussi bête ?»


Ces phrases sont autant de coups de poignards qui laissent des cicatrices profondes sur les adultes qu’ils sont devenus. Ces personnes ont du mal à se regarder dans un miroir, à croire qu’elles peuvent séduire et plaire. Dans la plupart des cas, elles se détestent, n’ont aucune estime d’elles-mêmes, et ont beaucoup de mal à se construire en tant qu’hommes ou femmes. Au fond d’eux-mêmes, ces individus restent ces enfants humiliés, rabaissés par un parent ayant l’ascendant sur eux et dont ils n’attendaient pourtant qu’un amour inconditionnel.


Il faut bien comprendre qu’un petit enfant pense toujours mériter ce qu’il subit de la part de ses parents, il ne remet pas en cause les maltraitances qu’il subies puisqu’elles lui sont infligées par ceux qui lui ont donné la vie, qui sont sensés savoir ce qui est bon pour lui. Plus tard, il prendra conscience de ce qui s’est passé, il pourra réaliser que ce dont il a été victime était totalement injuste, mais il gardera en lui ces blessures.



Comment se détacher de l’enfant que nous avons été et de ce qu’il a subi ?


La première chose à faire est avant tout de libérer la parole. Le thérapeute pourra également proposer au patient d’écrire, de coucher sur le papier tous les souvenirs, les émotions, les ressentis liés à ce qu’il a subi. Écrire est en effet parfois plus facile que parler. Dans tous les cas, déposer ce qu’on a vécu et tout ce qu’on ressent auprès d’une oreille bienveillante ou sur une feuille de papier, vider autant que possible un sac trop lourd est un premier pas qui demande certes beaucoup de courage mais qui est ô combien salutaire. Néanmoins, comprendre, savoir pourquoi persiste ce mal-être, en analyser ses origines, ne permet malheureusement pas d’effacer la douleur. Libérer la parole éclaircit les zones d’ombre, ce qui est certes un bon début, mais cela n’est pas suffisant.



Il existe différents compléments à la thérapie, afin d’avancer :


L’EMDR : désensibilisation et reprogrammation par des mouvements oculaires (Eye Movements Desensitisation and Reprocessing). L’EMDR permet une réduction des souvenirs traumatisants, en amenant les victimes de traumatismes à se souvenir de leurs expériences difficiles, et, par des mouvements répétitifs des yeux qui simulent l’effet guérisseur du sommeil paradoxal.

L’hypnose permet d’apaiser l’enfant intérieur qui est en chacun de nous en mettant en avant des ressources positives (souvenirs agréables, lieux apaisants…) afin de faire reculer les émotions négatives. Il s’agit en quelque sorte de rendre au passé ce qui appartient au passé, afin de s’ancrer dans le présent et de vivre de façon plus apaisée.

Le neurofeedback par électroencéphalogramme (EEG) : Des électrodes reliées à un ordinateur sont placées sur le cuir chevelu de la personne concernée, ainsi, certaines zones sont réactivées afin d’influencer les pensées et émotions du sujet en temps réel.

On peut également observer les bienfaits du yoga, à la méditation pleine conscience…


Quelle que soit la méthode choisie, il est important de savoir que dans ces situations-là on n’est pas seuls, qu’une main bienveillante peut être tendue et qu’on peut s’en sortir. Rien n’effacera jamais les dommages qui ont été causés, cependant, on peut se reconstruire et devenir un adulte heureux.


Comme Nietzsche l’écrivait en 1888 :


« Ce qui ne me tue pas me rend plus fort. »


C’est ce que Boris Cyrulnik a plus tard développé sous le concept de résilience : apprendre à se construire de manière satisfaisante malgré nos traumatismes.


Source : Psychologue.net


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